25/10/2015
Synode : le rapport final disqualifie le tapage mené par des "prophètes de malheur" depuis un an
La Relatio finalis des évêques a été remise au pape :
Le synode n'était pas un parlement chargé de voter une réforme sociétale. Comme l'admettent maintenant les agences elles-mêmes, le fameux « clivage » n'a opposé que deux « petites ailes » des pères synodaux. La plupart des participants ont joué le jeu de « l'élaboration d'une pensée commune », selon la formule du cardinal Scola. C'est le charisme des synodes et des conciles...
Le rapport final remis au pape n'est donc pas une proposition de loi : c'est un document de cinquante pages, forcément complexe puisqu'il dégage un consensus. Après quoi le pape, ayant constaté et étudié ce que pense l'Eglise universelle, publiera – d'ici un ou deux trimestres – ses conclusions et ses orientations qui feront autorité.*
Selon les rumeurs vaticanes, la question (hyper-médatique) de l'homosexualité** ne figurait pas dans le rapport : en fait elle y figure, sous la forme d'une recommandation de bienveillance envers les personnes. Une très large majorité d'évêques a en effet souligné la différence entre cette question et celle de la famille. Le pape prône la « bienveillance » envers les personnes homosexuelles : par ailleurs il rappelle que la vision chrétienne du mariage, naturellement et humainement fondé sur la bipolarité homme-femme, vient des propres paroles du Christ dans l'Evangile.
Certains qualifient ce rappel de « dogmatique » car étranger aux « valeurs d'aujourd'hui » : c'est-à-dire à l'air du temps, formaté par le marketing des comportements. On sait que les mots « dogme » et « dogmatique » ont pris un sens très péjoratif depuis le tsunami d'idéologie libérale économiciste*** des années 1990 ; la logique de ce nouveau sens est d'achever d'éradiquer de notre société toute référence à du permanent, ainsi que le droit de penser autrement que les médias.
La teneur de la Relatio finalis le confirme : comme nous le disions ici depuis le début, il ne fallait pas croire les médias, les groupuscules et les prophètes de malheur (comme disait saint Jean XXIII à l'ouverture du concile). Il ne fallait donc pas s'affoler, se répandre en propos de fin du monde, signer une pétition insolente ourdie en coulisses par une secte, se livrer à des marches pour supplier le Ciel de garder le synode et le pape dans l'orthodoxie – et autres gesticulations convulsives.
Il suffisait d'avoir confiance en l'Eglise et de vouloir marcher avec elle, au lieu de préférer le vieil homme en nous qui cherche à nous empêcher de devenir homme nouveau.
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* Prions pour que les partisans laïcs des "deux petites ailes" (opposées mais jumelles) acceptent alors de marcher avec l'Eglise.
** Nos journaux brandissent le coming out médiatique du monsignor polonais - comme si cette provocation avait à voir avec les problèmes des familles. (Alors qu'il y a une seule leçon à en tirer : le si sourcilleux cardinal Müller devrait mieux connaître le personnel de sa congrégation).
*** Imposée partout à la fin du siècle dernier, l'économie libérale exige la suppression des normes (surtout transcendantes), parce que l'existence de normes contrarie les dispositions psychologiques du consumérisme et de l'hyper-individualisme. Il y a incompatibilité entre l'Evangile et l'attitude "en deça du bien et du mal" attendue du consommateur.
15:45 Publié dans Eglises, Pape François | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : synode, pape françois
Commentaires
ULTRAMONTANISMES
> Je vous recommande cette lecture de George Weigel pour la fin du synode http://www.catholicherald.co.uk/commentandblogs/2015/10/24/letters-from-the-synod-special-edition-october-24/
avec laquelle vous entrerez sans doute en dissonance, pour partie.
Mais cela pointe en tout cas sur un sujet qui semble un peu "traité vite fait" par votre propos sur l'ultramontanisme supposé de certains catholiques français contre leur hiérarchie locale.
Est-ce la faute de la base si le magistère des papes précédents a été, en matière de théologie morale, si mal accueilli par les évêques locaux ? La base devait-elle témoigner du même dédain ou du même silence ?
Beaucoup de la confusion que nous avons vue ces derniers temps découle en effet du fait que les enseignements les plus récents sur la famille n'ont pas été assimilés par notre église européenne. Ainsi le manque de loyauté au pape dont vous dénoncez les effets délétères dans l'Église, il ne date pas d'hier, mais aussi d'avant-hier ; et ont encore leurs effets aujourd'hui. Si les propos de Paul VI, JPII et BXVI avaient été réellement assimilés, et que le mot d'ordre du pape François pour une attitude de miséricorde l'avait été aussi, les deux "ailes" que vous décrivez auraient été bien plus faibles, car la base de discussion aurait été bien plus commune entre les pères synodaux.
P.
[ PP à P :
- Sur l'ultramontanisme : vous avez raison pour l'époque des "ivresses de l'Eglise de France" (1970-1980), mais pas pour la période Jean-Paul II à partir de la catéchèse sur le couple et la sexualité. Son approfondissement de la vision chrétienne dans ces domaines (lire à ce sujet l'ouvrage d'Yves Semen 'La spiritualité conjugale selon Jean-Paul II', Presses de la Renaissance 2010) a fait l'objet de la vindicte des "conservateurs" et des "réactionnaires" d'alors. (Cf. textes effarants traitant JP II de 'permissif' et même d' "obsédé sexuel" parce qu'il expliquait que la sexualité avait un sens positif en elle-même et ne se réduisait pas à la procréation).
- Les "conservateurs" et "réactionnaires" de 2015 (très souvent formatés par la pensée unique des écoles de commerce) ont fait déraper l'ultramontanisme de leurs grands-parents. Rivés à leur formatage libéral, ils ont entrepris de se réclamer des papes, réputés par eux "libéraux", contre les évêques, réputés par eux "socialistes" (sauf deux ou trois exceptions qu'ils mettaient sur le pavois). Bien entendu ces deux labels étaient faux : mais le langage très pontifical de Jean-Paul II et Benoît XVI passant au-dessus de la tête du grand public, on pouvait leur prêter des idées contraires à ce que disaient leurs encycliques sociales...
Cet ultramontanisme bidon n'est plus possible avec François. Son langage populaire et direct est immédiatement compréhensible des foules. D'où le malaise des "libéraux-conservateurs" (et des "réactionnaires"), dont le fumigène s'est éteint... Certains se laissent ébranler par François : j'en rencontre dans mes conférences en France, et j'espère que ce sera le cas de Weigel aux Etats-Unis. Patrick Deneen devrait l'y aider !
- Restait un problème très franco-français : le peu d'ardeur des paroisses (jusqu'à une date récente) à relayer les enseignements pontificaux. Il faut que ça change, et c'est en train de changer. ]
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Écrit par : perlapin / | 25/10/2015
"DÉROUTÉS"
> Merci PP pour comme toujours vos réponses détaillées et pédagogiques.
Je crois que les divergences de vue proviennent aussi des différents sujets sur lesquels on se focalise. Je crois qu'il existe des catholiques européens et américains qui, sans animosité ou désaccord avec les positions sociales du pape, accordent par préférence personnelle ou même, surtout, par vocation, une très grande attention également aux questions doctrinales et morales. Il n'est pas dans leur intention ni dans la mienne (dans le meilleur des cas) de saucissonner l'évangile dans ces catégories.
Simplement, on peut se laisser "bousculer" ou "déplacer" par la pape sur ces questions sociales, tout en déplorant réellement qu'une bonne partie des pères synodaux et de l'opinion catholique qui les suit, parle de la famille et de ses enjeux comme si tout était à "inventer", comme si les challenges étaient nouveaux, alors qu'on y fait face depuis des décennies, et qu'ils ne sont simplement pas satisfaits des réponses données par les papes précédents, sans vraiment l'avouer pour autant.
La "théologie du corps" en est un excellent exemple ; alors qu'elle est méditée et diffusée par les catholiques orthodoxes anglo-saxons comme un vrai message d'espoir et que se multiplient les initiatives autour de ce thème, vous me pardonnerez de penser qu'un ouvrage écrit aux Presses de la Renaissance n'est pas vraiment une caution de l'ingestion du magistère de JPII par l'establishment français. Ce n'est ni Bayard, ni le Cerf, ni Mame.
Les évêques qui soulignent l'héritage de JPII et y travaillent en France, ce ne sont pas les évêques invités au synode, et ce ne sont pas les tendances dominantes dans notre pays. Je ne défends pas là un point de vue traditionaliste et je sais bien à quel point l'audace des papes précédents a pu dérouter. Mais justement ! Les réduire désormais à un conservatisme périmé est un non-sens historique.
P.
[ PP à P :
Je n'ai pas dit que la publication du livre de Semen était significative d'une attitude des milieux officiels (quoi que cet ouvrage ait été recommandé dans plusieurs diocèses). Je l'ai mentionnée parce que le livre a eu un certain succès en librairie ; je ne saurais dire qui l'a acheté.
A propos des évêques invités au synode : il ne me semble pas du tout que le cardinal Vingt-Trois, par exemple, soit en froid avec l'enseignement de JP II.
Les catholiques qui se disent "déroutés" par le synode se sont laissés intoxiquer par les médias et les groupuscules, qui leur ont présenté les thèses de la petite minorité "progressiste" comme étant celles du pape.
Les "déroutés" ont d'ailleurs bonne mine aujourd'hui, au vu du rapport final dont les médias eux-mêmes (le JDD d'aujourd'hui) conviennent que c'est à la fois une réaffirmation (modernisée) de la doctrine... et un succès pour le pape. Ce qui s'est passé au synode est différent de ce que les "déroutés" imaginaient.
A la vérité, ceux qui se prétendent déroutés - j'en connais - étaient braqués contre François depuis les premiers actes de son pontificat, et cela pour de tout autres raisons (politiques)... ]
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Écrit par : perlapin / | 25/10/2015
ISSUE SEREINE
> Cette issue relativement sereine ne saurait évidemment satisfaire les médias dominants, qui se refont un film sans rapport avec la réalité. En consultant les fils d'actualités de ce matin, je tombe sur cet article de vos (anciens ?) amis d'Atlantico, titré ainsi :
"Un joli flop... Comment le pape a perdu sa bataille... l'échec du pape François à convaincre sur les deux thématiques principales des réunions (homosexualité et ouverture aux divorces remariés)."
(src : http://www.atlantico.fr/decryptage/synode-famille-pourquoi-pape-perdu-bataille-bernard-lecomte-2404491.html )
Ah ! Ces thématiques *principales* ! On imagine le visage énamouré de l'onctueux monsignore polonais planant en filigrane sur l'assemblée synodale... du moins, c'est probablement ainsi qu'on le présenterait dans un docu-fiction. Et que dire de la "bataille perdue" du courageux pape gay-friendly !
Passé ce chapeau tonitruant, l'entretien avec Bernard Lecomte est un peu plus nuancé (mais juste un peu, lui aussi attaque sur ses deux sujets "emblématiques", avant de rappeler de façon plus juste le véritable objectif du synode).
Preuve s'il en est qu'on est en plein "racontage d'histoires" (pour ne pas écrire anglais), le même Atlantico contredit sans sourciller le "joli flop" dans un autre article :
"Le Synode sur la famille a conclu ses travaux par l’adoption d’un texte plus ouvert qu’attendu, qui donne notamment au pape la possibilité d'ouvrir, au cas par cas, la communion pour les divorcés-remariés."
( http://www.atlantico.fr/pepites/synode-entrouvre-possibilite-communion-pour-divorces-remaries-2406471.html )
Avec dans le corps de l'article, cette très jolie coquille :
"Dans ce document, l’homosexualité est seulement abordée sous l'ange des familles confrontées à cette situation."
Et si on lui parlait un peu, à cet ange, justement ?
AC
[ PP à AC - Les libéraux d'Atlantico n'ont jamais été de mes amis ! Leur élucubration sur le synode et le pape contredit les faits, si flagrants que même le 'Journal du dimanche' les rapporte. L'aveuglement est une des caractéristiques de la droite. ]
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Écrit par : Albert Christophe / | 25/10/2015
SENS DE L'EGLISE
> Merci de tout cœur de nous aider ainsi à mieux comprendre la parfaite cohérence entre le message du Saint Père et l'Evangile. Continuez à développer en nous le sens de l'Eglise.
Claude Delaunay
[ PP à Claude Delaunay - Votre approbation m'est précieuse, cher confrère ! ]
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Écrit par : Claude Delaunay / | 25/10/2015
L'HOMÉLIE ET NOUS
> Dans son homélie de clôture, le pape dit : "Une foi qui ne sait pas s’enraciner dans la vie des gens demeure aride et, au lieu d’oasis, elle crée d’autres déserts".
Je me bats pour que l'intelligence de la foi retrouve toute sa place dans les paroisses, dès le plus jeune âge, mais aussi pour les adultes. On infantilise tout le monde en permanence, entre "témoignages" et "pop louange", "church party" et "diocèse en marche vers une nouvelle impulsion"...
Les enfants de 6ème que je reçois en aumônerie semblent au contraire apprécier de cogiter, et qu'enfin cesse l'éternel coloriage-découpage-collage-bricolage de misère, qui fait qu'au bout de trois ans de supposé catéchisme, ils ne savent absolument rien de la foi (je n'exagère pas).
Il y a depuis trop longtemps, en France (profonde) en particulier (je ne parle pas des grandes villes...), un anti-intellectualisme qui tue la foi et empêche toute transmission.
François dit aussi : "Ceux-là, comme Bartimée, ont la foi, parce que savoir qu’on a besoin de salut est la meilleure façon de rencontrer Jésus". Dans le consumérisme de masse ambiant, "savoir qu’on a besoin de salut" devient un sentiment rare ; comment faire ressentir ce déchirement intérieur, faire advenir cette prise de conscience fondamentale de notre état de nature déchue en besoin de rédemption, autrement qu'à l'occasion d'un gros accident de la vie, où la détresse, la blessure, permettent de sentir et de comprendre notre radical besoin de Jésus le Sauveur ?
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Écrit par : Alex / | 25/10/2015
Much ado aout nothing...
> On ne voit malheureusement pas ce qu'il y a de neuf dans ce synode. Le recours au for interne ne règle rien, on trouve déjà l'histoire chez St. Thomas (supplément à la Summa) qui dit que si l'Eglise se trompe, c'est seulement "materialiter" parce qu'elle juge des faits objectifs, forcément.
On fait quoi maintenant ? Je n'ai pas compris.
JG
[ PP à JG :
On se réveille de nos cauchemars gallo-centrés et on se rappelle la règle du jeu : le "résultat" d'un synode, ce sont les directives que publiera le pape et qui ne seront certainement pas "nothing" - ce n'est pas son genre.
Le synode n'est pas un parlement chargé de voter une loi : c'est un creuset d'idées chargé d'exprimer au pape l'état d'esprit de l'Eglise universelle.
Le synode 2015 a aussi été le point de départ de la décentralisation voulue par François, et l'occasion pour les évêques de l'hémisphère Nord de toucher du doigt le fait que le catholicisme d'aujourd'hui se développe principalement dans l'hémisphère Sud.
Les Français cathos devraient arrêter de se prendre pour le nombril de l'Eglise : en 2015 c'est un déni de réalité. ]
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Écrit par : JG / | 26/10/2015
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